Pourquoi t'as ouvert un blog ?

Je me suis longtemps vue comme un gentil petit soldat de la fonction publique, parce que j'avais le Service Public chevillé au corps. Certains s'engagent dans les ordres ou l'armée, d'autres pour un parti politique, moi, c'était Servir le public qui me faisait rêver depuis mon enfance. Bizarre comme rêve de gosse, mais c'est comme ça.

Le problème c'est que le Service Public, je l'ai chevillé à un corps rendu capricieux par la "maladie". Les dés étaient pipés depuis le début de la partie. A mesure que la "maladie" a fait son chemin, la réalité de mon engagement s'est faite plus douloureuse chaque jour. Plus douloureuse, et surtout, plus frustrante. Plus j'entendais "Anne-Sophie, on sait que votre créativité est quasiment sans limite, mais elle n'a pas sa place ici", plus cette foutue créativité voulait s'exprimer.

Depuis cinq mois, ce sont les caprices de mon corps qui dictent mon quotidien. Il ne faudrait pas en plus que j'y ajoute la frustration ! Alors, en partageant mon point de vue, j'ai envie de donner à voir une réalité que le quotidien rend au mieux invisible, mais souvent, difficilement supportable. Dépasser le cadre imposé par un visage, une tenue vestimentaire et ne conserver qu'une silhouette intégrée à l'environnement naturel. 

 

J'ai commencé par "voler" des gros plans  de mes proches comme un paparazzi, pour n'enregistrer d'eux que l'image qui me semblait la plus douce. Les paysages, les "vues de bord de mer et les épices du souk du Caire" (Merci Bénébar !), les scènes posées, c'est pas ma came. Durant ces dix années consacrées à saisir mon entourage dans sa spontanéité la plus nue, j'ai fait un constat cruel : je n'étais pas sur les photos. Pas au sens où personne ne me photographiait. Non. Je n'étais pas sur les photos parce que j'avais tellement retouché mon personnage que je ne savais plus ni à qui ni même à quoi je ressemblais.

Alors, je me suis cherchée partout en suivant mon ombre dans la neige, dans la mer, dans l'herbe grasse de ma verte campagne (il me manquera toujours mon ombre dans le ciel - infaisable sans retouche) tel un Petit Poucet qui ne veut pas perdre le contact avec ses origines.

Progressivement, mon ombre a accepté la compagnie des autres.

Après quelques mois passés au plus près du sol pour saisir les reflets ou les scènes de vie dans les gouttes d'eau du jardin, je reprends contact, avec ce (ceux ?) qui m'entoure. Mais sans précipitation. Chi va piano, va sano e va lontano. 

Je livrerai bientôt une série de photos consacrée à "ma" chère commune : Jumièges. Mais Vu de ma fenêtre, évidemment !